Affecter une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée aux dépenses de Sécurité sociale serait une piste face à la dégradation de son déficit, mais on est loin du consensus.
Faut-il revoir en profondeur le modèle français de financement de la protection sociale ? Le débat est dans l’air depuis longtemps et il a été relancé par Emmanuel Macron lors de son intervention télévisée du 13 mai, lorsqu’il a proposé la tenue d’une grande conférence sur le sujet entre le gouvernement et les organisations patronales et syndicales.
Si le problème refait surface, c’est qu’il y a urgence. Le 26 mai dernier, la Cour des Comptes a publié un rapport, pour le moins alarmiste, sur la dégradation du déficit de la Sécurité sociale. Selon ses auteurs, si rien n’est fait, ce déficit pourrait passer de 15,3 milliards d’euros en 2024 à 22,1 milliards en 2025 et 28,1 milliards en 2028, ce qui pourrait poser un problème de liquidités et donc de paiement des prestations.
Du côté des organisations patronales, on considère depuis longtemps que le financement des systèmes de santé, retraite, assurance-chômage pèse trop sur le travail, ce qui renchérit son coût pour les entreprises au détriment de leur compétitivité et diminue, dans le même temps, les salaires nets au détriment des salariés. La Cour des Comptes, de son côté, pointe le poids des exonérations des cotisations sociales dont bénéficient les entreprises : elles sont passées de 20,9 à 77,3 milliards d’euros entre 2014 et 2024.
Parmi les alternatives aux cotisations sur les salaires figure une hausse de la CSG ou de la TVA. Y céder serait une décision éminemment politique. L’idée d’affecter une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée aux dépenses de sécurité sociale, éventuellement en baissant le montant des cotisations sur les salaires, n’est pas nouvelle. La mesure a failli être mise en œuvre sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Mais elle est potentiellement électrique : une majoration de la TVA peut provoquer un surcroît d’inflation et le pouvoir d’achat des plus modestes est affecté.
Néanmoins, le Haut conseil du financement de la protection sociale, dans un récent rapport, indique que c’est une piste à explorer. « Elle n’a pas d’impact direct sur le coût du travail ni sur la capacité à exporter », estime-t-il, puisque les produits vendus à l’étranger ne sont pas assujettis à la taxe. Et « c’est un impôt à fort rendement » : si les quatre taux en vigueur sont relevés d’un point, le gain est de près de 13 milliards d’euros par an.
Pour autant, mettre en place cette mesure n’est pas gagné d’avance, faute de consensus politique ou même syndical.
La position de la CFE-CGC
La CFE-CGC n’est pas hostile dans son principe à l’organisation d’une conférence sociale, à condition que l’on distingue le financement des retraites, de l’assurance-chômage ou des accidents du travail, du financement du système de santé et de la branche famille. Pour Christelle Thieffine, secrétaire nationale CFE-CGC à la protection sociale, « les dispositifs « contributifs », c’est à dire en fonction du niveau de salaire (pension de retraite, indemnités journalières d’arrêt de travail, etc.) doivent être financés par des cotisations sur les salaires. Les dispositifs de solidarités et non contributifs, (frais de santé, APL…) peuvent être financés par d’autres sources, comme les impôts ou la TVA. »